Trade Schools : les savoirs en partage

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Une séance de Trade School Paris.

Véritables innovations ou simples résurgences, les « communautés collaboratives » ont en tout cas le vent en poupe. Et le système du troc connaît une nouvelle jeunesse. Dans le sillage des « Accorderies » et autres SEL (Systèmes d’échanges locaux), qui permettent des transferts non monétisés de services entre particuliers, les « Trade Schools » entendent faire circuler sans entrave le savoir. Tous les savoirs.

Faire se rencontrer des « needs » (besoins) et des « have » (ressources) : c’est le principe réactif du réseau américain OurGoods, qui vise à  faciliter l’éclosion et la finalisation de projets artistiques indépendants, souvent l’œuvre de jeunes créatifs. C’est sur cet axiome (je t’échange, tu partages, on se rend service) que les fondateurs d’OurGoods ont formulé en 2010 une nouvelle expérience. Après s’être assuré, en échange d’un travail de design pour ses propriétaires, l’usufruit d’un magasin new-yorkais, ils y ont organisé, un mois durant, une école éphémère et ouverte à tous.

Partages de connaissances et essaimage mondial

Plus de 800 personnes ont afflué pour partager leurs compétences et leurs connaissances, donner ou assister à des cours portant sur des sujets aussi divers que la fabrication du beurre, la recherche de bourses et de subventions, ou l’utilisation de WordPress… Pour seul prix de leur enseignement, les professeurs d’occasion reçurent des chaussures de jogging, des disques de musique, des aliments ou encore quelque service correspondant à une attente particulière. Le principe est en effet des plus simples : chaque enseignant dresse une liste de choses qui l’intéressent ; l’élève y trouve un objet ou une compétence contre lequel troquer le cours.

Fort de ce premier succès, l’expérience a depuis été renouvelée chaque année, dans des espaces toujours plus grands et pour de plus longues durées. En 2012, afin que l’initiative soit diffusable à l’envie, une plateforme Web ouverte a été mise au point, pensée pour pouvoir être utilisée aisément par quiconque souhaite ouvrir une Trade School près de chez lui… Résultat : le réseau compte désormais des salles de classe dans plus de cinquante villes tout autour du globe, de Londres à Guadalaraja, en passant par Singapour, Dublin, Toronto, Milan, Cologne, Los Angeles, Rotterdam, Athènes, Manille…

Trade Schools en version française

À Paris, après une première mini-édition en 2012 au Palais de Tokyo, la Mutinerie et la Maison de l’Arbre de Montreuil ont successivement accueilli des salles de classe éphémères. Des partenariats sont en cours avec le Moulin à Café et la Cité des Sciences. Une Trade School existe également à Toulouse. Mais on trouve aussi à Strasbourg une initiative similaire, baptisée « Troc Savoirs », en l’occurrence dans l’une des antennes du Réseau d’Echanges Réciproques de Savoirs fondé en 2010 et lui-même inscrit dans la démarche du Foresco (Formation réciproque, échanges de savoirs et création collective), qui rassemble plus de 200 structures à l’échelle nationale).

Le local est le plus souvent prêté, de façon temporaire, et l'école fonctionne avec le statut d'une coopérative. Certains professeurs demandent aux élèves d'apporter du matériel, nécessaire à la leçon, d'autres requièrent des compétences spécifiques ou des retours d'expérience voire, plus prosaïquement, de quoi partager un encas. Au pire, l’élève « paiera » son cours en faisant le ménage en fin de session.

À la fois professeur et élève

Les valeurs mises en avant par les troqueurs parisiens sont les mêmes qu’ailleurs : partager des connaissances bien sûr – sans hiérarchie entre savoirs académiques et pratiques – mais aussi réunir et mélanger les individus. Bien entendu, les cours (yoga, atelier d’écriture, psychologie, cuisine, numérique, etc.) sont proposés sur la plateforme Web et on peut participer en ligne à certains d’entre eux. Les Trade Schools s’intéressent particulièrement aux nouveaux savoirs, pratiques ou théoriques, issus des préoccupations écologiques, du développement des économies locales et collaboratives et de l’esprit « Do it yourself ».

L’école est donc ouverte à tous, sans distinction d’âge, d’origine socio-culturelle ou de niveau d’études. Nul besoin de diplômes pour enseigner, ni d’argent pour apprendre. Chacun peut tour à tour professer ou apprendre. Décloisonner les lieux et les temps de l’apprentissage, transmettre de tous vers chacun, partager toute l’information et les connaissances, les chantiers sont à la mesure des ambitions de ces nouveaux encyclopédistes de l’âge numérique. En arrière-plan, il s’agit de bâtir une communauté de l’échange. Une utopie bien adaptée à une époque prodigue en jeunes gens à la fois surqualifiés et désargentés. Ils seraient déjà plus de 15 000 à avoir été séduits de par le monde.

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Ils seraient déjà plus de 15 000 à avoir été séduits par les Trade Schools de par le monde.