Comment rompre l’isolement des malades hospitalisés pour de longues durées ? L’idée de My Hospi Friends, d’ores et déjà concrétisé ou en test dans une cinquantaine d’établissements hospitaliers auprès de patients : en créant un réseau social qui leur est spécialement dédié.
En septembre 2011, Julien Artu, cadre dans l’hôtellerie et passionné de nouvelles technologies, est victime d’un accident de la route qui le cloue au lit pendant cinq mois. Pour se rapprocher de son entourage, il décide alors d’utiliser les réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter. Mais ils ne s’avèrent pas toujours adaptés à sa situation de patient : « Sur Facebook, il y a des gens qui bossent, ils ne savent pas comment vous parler, à vous le malade. De plus, au bout de quelques temps, quand les visites des proches s’espacent, Internet ne suffit plus à rompre l’isolement. » Pourtant, à deux chambres de la sienne, il y avait peut-être quelqu’un avec qui il aurait pu discuter. Une fois rétabli, Julien Artu décide donc de créer ce réseau social qui lui fit défaut durant son hospitalisation.
Un réseau social anonyme
En 2013, le réseau social My Hospi Friends voit le jour. La plateforme est lancée sur le Net en s’inspirant de l’interface de Facebook. Selon Julien Artu, l’application ressemble davantage à un site de rencontre qu’à un réseau social classique. Les patients communiquent entre eux, au sein de l’hôpital, grâce à leurs profils où ne sont renseignés ni l’âge, ni le sexe, ni leurs maladies. L’accent est mis sur les loisirs : « My Hospi Friends doit permettre de s’évader de la chambre d’hôpital par le biais de centres d’intérêt comme le sport, le bricolage, la mode, le cinéma, etc. »
L’entrepreneur précise que son application ne recueille aucune donnée de santé. L’inscription est anonyme et les données ne sortent pas du réseau social. Il n’est donc pas question de les revendre aux laboratoires pharmaceutiques ou à d’autres structures commerciales.
Financé entièrement par les hôpitaux
Le service My Hospi Friends doit être entièrement financé par l’hôpital qui achète la licence avant de le mettre gratuitement à disposition de ses patients. En avril 2014, l’hôpital Foch à Suresnes dans les Hauts-de-Seine a été le premier établissement à y adhérer. Il aurait déboursé 10 000 euros pour une durée de deux ans, selon un article du Point publié en mai 2014. « Nous avions de bons médecins, mais nous souhaitions améliorer le bien-être du patient », détaille Valérie Moulins, directrice du service de communication de l’hôpital Foch.
Depuis son lancement, le service aurait conquis selon son fondateur une cinquantaine de structures hospitalières, la grande majorité en Île-de-France – dont les hôpitaux de l’Est parisien (Saint-Antoine, Armand-Trousseau, Rothschild et Tenon) et les deux de la Fondation Cognacq-Jay. En revanche, l’engouement des malades et indirectement des équipes soignantes pour ce nouvel outil varie beaucoup selon les établissements. L’usage des écrans n’est pas envisageable de façon égale pour tous les patients. De plus, il y a des directeurs d’hôpitaux qui craignent que la plateforme ne servent à certains de défouloir contre le personnel hospitalier – au risque de la diffamation. C’est bien pourquoi, tempère Julien Artu, une « modération est assurée par la dizaine d’employés que compte l’entreprise qui commercialise l’application. »
Une vraie communauté
Pour défendre son projet auprès des cadres hospitaliers, Julien Artu affirme : « Tout le monde est gagnant, car un patient occupé est un patient moins casse-pied pour les soignants. » Pour l’heure, aucune étude ne permet d’affirmer les bienfaits de ce nouveau service sur le mental des patients, et s’il permet véritablement de rompre l’isolement dont les malades hospitalisés seraient victimes. My Hospi Friends n’en poursuit pas moins un développement très rapide, notamment en Corse dont plusieurs établissements se disent intéressés, ou auprès d’hôpitaux militaires. Une nouvelle étape pour son créateur qui souhaite, à moyen terme, connecter les différents réseaux locaux et créer une vraie communauté de patients.