Dossier / Social made in USA

Quand infirmières et infirmiers deviennent des makers

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Le polissage d’une pièce dans un Maker Heath Space.

Quand les professionnels de la santé s’associent au prestigieux MIT (Massachusetts Institute of Technology) de Boston, cela donne naissance à Maker Nurse, plateforme du troisième type qui connecte les bonnes idées des infirmières et infirmiers aux « bricoleurs » des fablabs. Résultats : des solutions qui facilitent la vie des patients, et un exemple suivi désormais par plusieurs hôpitaux aux Etats-Unis. 

L’idée brillante est écrite sur un morceau de papier, envoyée par mail sur son téléphone, rabâchée entre collègues ou le plus souvent placée dans un coin de la tête avant de s’évanouir. Trop de questions – comment faire ? Suis-je légitime ?  –, des barrières techniques, le manque de temps : les étapes entre l’éclair génial et sa réalisation palpable aboutissent souvent à son abandon pur et simple.

Une infirmerie en mode R & D

Le mouvement des makers (« ceux qui font », autrement dit potentiellement tout le monde), abaisse les barrières entre l’idée et son application. À coup d’imprimante 3D, d’Arduino et surtout des compétences de tous, de l’expert de montage de meuble en kit au geek rompu au codage de page Web, les réalisations des makers n’ont rien à envier à une équipe d’ingénieurs en R & D. La communauté Maker Nurse applique cette philosophie du « faire » dans les hôpitaux.

« Les infirmiers ont une compréhension innée aussi bien du problème clinique auquel les patients doivent faire face que de ce qui les gêne au même instant », explique Anna Young, la cofondatrice de Maker Nurse. Cette enseignante en conception de matériel médical du prestigieux MIT de Boston veut valoriser la capacité d’innovation des infirmières et infirmiers.

Un ingénieux levier pour dépasser les barrières de l’ingénierie

Le monde hospitalier a ses codes, ses contraintes, souvent vécus, rarement décrits ou analysés : un ensemble de connaissances difficiles à formaliser et auxquelles n’ont pas directement accès les concepteurs des matériels qui meublent les couloirs et les salles de consultation des hôpitaux. De fait, ceux et celles qui côtoient les malades au quotidien sont parmi les mieux placés pour répondre aux problématiques concrètes du soin, donc des patients. Et « la compréhension innée » des infirmières et infirmiers que défend Anna Young tiendrait plutôt aux acquis de l’expérience de ces femmes et hommes du monde médical, confrontés à des problèmes concrets, mais parfois bloqués par des solutions qui relevaient auparavant de l’ingénierie.

Maker Nurse propose de faciliter la conception et la mise en place de ces solutions. La communauté est organisée comme une plateforme : elle fournit les machines et forme les personnels au sein de Maker Health Spaces. Ces espaces, implantés à l’intérieur même de l’hôpital, sont pourvus des outils des meilleurs fablabs et mis à disposition des soignants pour imaginer et fabriquer les outils qui faciliteront la vie des soignés. Un coordinateur permet aux participants de se familiariser avec les outils (imprimante 3D, découpe laser, etc.) et de simplifier le processus de création.

Ces espaces de soin tissent leur toile

Un compteur de cachets, un berceau berceur mécanisé et programmable, un lit douche, une boîte de médicament qui brille dans le noir font partie des réalisations de ces créateurs du commun. Tous les Maker health spaces sont connectés entre eux, permettant de faire marcher au plus fort l’intelligence collective sur les projets en cours, en partageant leurs trouvailles dans une logique open source.

La communauté essaime à travers les États-Unis. À l’initiative du département Maker health du MIT, plusieurs Maker health spaces sont installées dans plusieurs hôpitaux du pays, notamment au Texas et dans le Massachusetts.

Une émanation du MIT, le Pop Up Labs finance le support logistique et les formations dans les hôpitaux. L’initiative bénéficie également du soutien de la fondation Robert Wood Johnson.

Depuis 2013, plus de 1 000 infirmières et infirmiers ont participé au projet. L’ambition d’Anna Young est que Maker Nurse développe « la prochaine génération de technologie de la santé » avec un credo : grâce aux bons outils, chacun peut mettre à profit sa créativité.

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Depuis 2013, plus de 1 000 infirmières et infirmiers ont participé au projet.